samedi 22 novembre 2014

(Grosse) tranche de cliente :

Petite visite dans une boutique du centre-ville, histoire d'y lécher les vitrines le temps que mon chéri finisse de courir sur place. Dès que j'ouvre la porte, je l'entends; impossible de passer inaperçue, la p'tite clochette au haut d'la porte m'a trahie. J'entre et je sens son regard sur moi; elle s'approche, souriante. D'un coup d'œil rapide, je constate qu'il n'y a personne d'autre dans la boutique; je sens déjà un peu la pression s'installer. "Bonjour!" me dit-elle, "n'hésitez surtout pas à me demander quoi que ce soit, je n'ai que ça à faire!" ajoute-t-elle avec empressement. Hum... Ce n'est jamais bon signe quand les vendeuses disent ce genre de choses...
Je lui sourit et lui répond gentiment, échangeant au passage deux ou trois banalités sur la température et puis je me retourne, prête à faire mon p'tit tour de magasin. Je fais un pas, puis deux, et comme je l'anticipais, elle me suit; discrètement, faisant semblant de faire autre chose, mais je ne suis pas dupe, je vois clair dans son p'tit jeu. J'essaie de la déjouer en cessant de bouger, en reculant, en changeant de direction à la dernière minute, mais rien n'y fait; son œil est vif, je la soupçonne même d'anticiper mes mouvements, comme le chasseur qui guette sa proie. Elle a de l'expérience, ca se sent. Elle continue à être gentille, me parle de tout et de rien, m'explique un tas de choses sur chaque objet que mon regard croise ou que mes doigts touchent. Elle me propose même de sortir les trucs du comptoir, de les essayer, ce que je refuse gentiment chaque fois. Elle est coriace, elle ne lâche pas le morceau.
Pour ceux qui me connaissent bien, vous savez que je ne porte que très rarement de bijoux et que si j'en porte, ce n'a rien de bling-bling. De plus, je ne me maquille pas et mes vêtements sont d'une simplicité évidente. Mon attention se porte donc tout naturellement vers des choses simples, artisanales, qui me ressemblent. Je m'approche donc éventuellement d'une étagère ou il y a de petits bracelets, très colorés; j'ai à peine le temps de les regarder de plus près qu'elle est là, me précisant à quel point ils sont adorables, abordables, pratiques par leur élasticité, plein de couleurs et qu'ils conviennent à tous les styles; puis elle ajoute: " Ha oui! Et ils sont faits par des handicapés mentaux!" Là, elle a toute mon attention!
"Vraiment?" lui dis-je, de toute évidence, très intéressée! "Oui, oui, c'est pour ça qu'il ne sont pas chers! Ils font ça avec.... Heu... Je ne sais pas trop en fait, mais ca fait de beaux cadeaux pas trop dispendieux quand-même! Il y aussi des colliers là-bas." Je me retourne, elle est déjà rendue, les pointant élégamment, comme dans les émissions de télévision. Je m'approche, elle ajoute : "Vous voyez la photo ici, et bien c'est une photo d'eux là, ceux qui font ça, ben... Les handicapés mentaux". Je souris. Oui, elle est un peu maladroite mais je vois bien qu'elle n'est pas méchante pour deux sous. Je prends donc le temps de les observer de près, curieuse et admirative du projet. Elle est toujours là, m'observant, elle ajoute encore que ce n'est pas de la grosse qualité, bien-sûr, mais bon, ca peut faire un beau cadeau pareil! Je lui souris à nouveau et lui dis que de toute façon, on achète aussi pour soutenir la cause. Elle est d'accord, évidemment. Je crois qu'elle en prends bonne note, pour une autre fois peut-être, avec une autre cliente. C'est alors que mon regard est attiré vers la droite.
Dans un "rack" de porte-clés et autres babioles du genre, je vois un truc qui m'appelle... Je fais rapidement le tour du comptoir et me dirige vers l'objet en question. C'est un cœur, grand comme la paume de ma main, gris, fait d'une matière inconnue (même pour notre vendeuse), situé à quelque part entre la pierre et le métal, très léger, fragile même, avec une petite corde de jute. Le prix : 3$, en spécial. Je le regarde, intriguée par la beauté d'un objet d'une simplicité aussi étonnante. C'est à ce moment précis qu'elle me sort de mon "fixe" pour attirer mon attention sur un objet qu'elle a dans sa main. Je reviens sur terre, dirige mon regard sur elle et réalise que l'objet en question est un collier (bling-bling X1000) de Caroline Néron... Elle le fait miroiter, dans tout les sens du mot, tentant de générer une envie, sûrement, toujours très gentiment, je tiens à le mentionner. Je me penche alors vers elle et je lui dis tout bas que par principe, je n'achèterai jamais du Caroline Néron (c'est une longue histoire que je vous raconterai sûrement un jour!). Son visage change, elle recule et repose le bijou. Elle m'avise qu'elle s'en va s'occuper d'une autre cliente qui vient de faire son entrée et que je n'ai qu'à lui faire signe au besoin. Je souris et hoche la tête. Je peux poursuivre mon tour de magasin, sans pression.
Je reviens encore et toujours vers mon p'tit cœur, me décidant finalement à les prendre tous, ne sachant même pas encore ce que j'en ferai. Sans vouloir faire de mauvais jeux de mots, c'est un Coup de cœur, tout simplement. La facture : un gros 13,80$. Parfait pour moi.
P.S. : Je tiens à préciser que je n'ai rien contre les bijoux scintillants et que la vendeuse était d'une politesse et d'une gentillesse exemplaire malgré son p'tit côté "collant" mais je me questionne définitivement sur sa capacité à "lire" sa clientèle et répondre à ses besoins... M'offrir un bijou de Caroline Néron, c'est comme offrir un fusil de chasse à un végétarien...!

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